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Page:Perrin - Les Egarements de Julie, 1883.djvu/19

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DE JULIE


nous nous faisions malgré nous estimer ; et si notre conduite était régulière, ce n’était assurément qu’à la grande disproportion de notre âge que nous en devions rapporter le mérite : j’étais trop jeune et ma tante ne l’était pas assez. La mauvaise éducation que je reçus n’eut garde de me former au bien. Une vie assez dure me laissait une avidité démesurée pour ces petites aisances qu’il est permis à tout le monde de se procurer quand on le peut. Tout enfant que j’étais, je ne voulais pas connaître d’autres volontés que les miennes : tout en moi faisait pressentir un caractère difficile à manier.

L’aversion pour le travail, l’ennui des remontrances, l’antipathie pour ma tante, l’habitude du mensonge, un goût décidé pour la vanité, ne promettaient pas en moi d’heureuses suites : cinq ou six airs d’opéra, toujours en l’honneur de l’amour, fredonnés sans cesse à mon oreille, faisaient ma principale étude ; et quand je fus une fois parvenue à me les rendre familiers, ma tante conçut un favorable augure des essais de mon gosier, qu’elle se garantit dès lors séducteur. Mes yeux promettaient déjà un de ces minois que les agaceries font réussir les quinze premiers jours : ainsi les minauderies, les jeux de mots, les œillades, les premiers principes de la coquetterie enfin me furent régulièrement ensei-