cinct ; mais je n’eus plus à Paris la même complaisance
pour la modicité de ma bourse : il
fallut me satisfaire sur tous les brimborions
d’une femme à fantaisie ; il ne me restait pourtant
guère de mon état passé qu’une grande facilité
à dépenser ce qui aurait encore pu
quelque temps subvenir à mon nécessaire. Il
me fut enfin impossible de raisonner prudemment :
l’air et le train de Paris m’inspiraient
encore plus que jamais cette vanité, à laquelle
je n’avais déjà été que trop accoutumée ; j’employai
les ouvrières, j’occupai les marchandes de
modes ; et sans m’embarrasser de l’avenir, j’accordai
tout au présent. Dégagée des premiers
soins de ma parure, je me rendis un soir dans
la rue du Chantre, j’y achetai quelques fruits à
une vieille femme, à laquelle je demandai, sans
affectation, le nom des locataires qui occupaient
la maison que je lui désignai, et qui était celle
où j’avais demeuré avec la Château-Neuf. Pouvais-je
mieux m’adresser pour en entendre plus
que je ne voulais ? La bonne femme était intarissable :
elle m’apprit, sans se donner le temps
de respirer, les noms, surnoms et facultés des
gens de la maison ; ajouta qu’anciennement il y
avait demeuré deux vieilles femmes qui ne valaient
pas grand’chose ; qu’on leur avait enlevé,
deux ans auparavant que l’une des deux mou-
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LES ÉGAREMENTS