tits malheurs. Comme, en l’écoutant, j’avais le
visage tourné vers la porte, à laquelle elle avait
le dos opposé, j’aperçus un domestique qui
cherchait à parler à quelqu’un : Madame, lui
dis-je, on vous demande ; ce qu’ayant entendu
ce garçon, il me dit que son maître l’envoyait
savoir des nouvelles de la personne qui était
tombée la veille sous son carrosse, et qu’il avait
ordre de lui remettre un paquet cacheté, qu’en
même temps il me présenta. Je l’ouvris avec un
battement de cœur dont l’effet se remarqua aisément
sur mon visage : je me flattais d’une apparence
de retour ; mais quelle était mon erreur !
je ne trouvai que dix louis en or, enveloppés
dans un papier, sans un mot d’écrit : ce n’était
qu’un acte de pitié. S’étant fait informer de moi
dans la maison par le même domestique qu’il
m’avait envoyé, il avait appris que j’étais fort
mal à mon aise, et sa générosité l’avait déterminé
à me procurer ce secours. Piquée de la
façon dure, selon moi, dont il s’y prenait pour
me soulager : Rendez à votre maître son argent,
dis-je à celui qui me l’avait apporté ; j’aurais
trop à rougir de ses bienfaits. La vieille Remy,
voyant l’argent s’en retourner, ne savait plus
où elle en était. Madame Mont-Louis me témoigna
sa surprise, et me dit mystérieusement qu’il
y avait quelque chose là-dessous ; elle me con-
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DE JULIE