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Page:Perrin - Les Egarements de Julie, 1883.djvu/290

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LES ÉGAREMENTS


fermé, au bout desquels on me remit un matin en liberté, après m’avoir donné quelque argent et un ordre précis de ne plus reparaître si je voulais n’être pas exposé à quelque chose de pis. Je n’eus seulement pas le temps d’embrasser mon ami ; je gagnai le premier port de mer, trop heureux encore de recouvrer la liberté, que je n’espérais plus. Il n’était pas difficile de deviner qui avait conduit cette indigne machination. Je revins en France, où je me serais vu réduit à la mendicité, si, dans le premier temps de mon mariage, on avait voulu me faire le remboursement d’une misérable rente de trois cents livres, qui m’aide à traîner une vie odieuse, que je n’ai pas la force de m’arracher, mais dont je verrais sans regret approcher la fin. Jugez après cela, mademoiselle, si j’ai raison de fuir les hommes et leur commerce ; je vous ai supprimé nombre de particularités qui, sans être de la même conséquence, ne m’ont pas moins été chagrinantes. Vous êtes jusqu’ici la seule qui ne m’ayez pas vendu le plaisir d’obliger par les suites les plus fâcheuses.

Le récit de ses malheurs me touchait d’autant plus qu’il paraissait moins les avoir mérités. Je voulus entreprendre de lui donner quelque consolation, mais inutilement, ses plaies étaient trop profondes pour lui en procurer si tôt la