Aller au contenu

Page:Perrin - Les Egarements de Julie, 1883.djvu/74

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
58
LES ÉGAREMENTS


et il acheva de nous surprendre par une bourse de cinquante louis qu’il rangea malicieusement sous ma serviette. Il me fit cependant ses excuses d’avoir hasardé si cruement cette petite bagatelle ; mais il me représenta que c’était ordinairement aux demoiselles à choisir elles-mêmes leurs épingles. La Château-Neuf et la Daigremont serraient le tout par précaution, lui criant qu’il n’était pas permis de faire pareilles folies. On ne les lui pardonna même qu’aux conditions qu’il ne lui arriverait plus rien de pareil ; mais on ne put rien gagner : il avait encore à cœur certains petits meubles, et il fallut de toute nécessité avoir la complaisante de lui laisser par la suite passer sa fantaisie. Le souper se fit, quoique secrètement, avec toute la gaieté d’une compagnie d’accord sur ses plaisirs. M. Poupard crut par sa largesse s’être au moins acquis le droit d’avouer et son amour et ses espérances : quand il fut au champagne il voulut, aux dépens d’une autre tabatière, tenter une seconde retraite ; mais nos vieilles, qui se possédaient autant qu’il paraissait hors de lui, n’eurent garde de se retirer : l’heure était scandaleuse, c’était infailliblement le perdre que de le satisfaire, et feignant ignorer le but de ses libéralités, on les caractérisait du nom de bienfaits, dans lesquels on ne paraissait entrevoir que la simple vue d’obliger.