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LES ÉGAREMENTS


bienséance, lui refuser de m’acquitter : quelque effort qu’il fallût me faire, le devoir l’emporta, et j’abandonnai enfin à la reconnaissance ce qui ne devrait jamais être réservé qu’à l’amour. On me pardonnera bien de passer légèrement sur l’affreuse opération de mes charmes ; il me suffira de dire qu’après un prélude assorti à l’action, la figure humaine disparut tout-à-fait, et me laissa entre les bras le plus affreux indéfini qu’ait jamais produit le caprice de la nature : je ne distinguai plus qu’une masse étayée comme un crapaud sur quatre pattes : je n’entendis plus qu’une respiration convulsive, dont le râle semblait vouloir exhaler l’âme. Je voulus en vain me rappeler mon amant pour tirer parti de la nécessité où je me trouvais, la force de l’imagination ne put jamais effacer l’affreux portrait que j’avais devant moi : le poids m’accabla, mes yeux se fermèrent, et le misérable crut encore m’avoir fait partager ses horribles transports.

S’il est vrai que l’expiation du crime nous met à l’abri du remords, je ne dus jamais en ressentir à ce sujet ; ma faute portait par elle-même une rigoureuse pénitence, et je pouvais bien ne m’avouer coupable que des plaisirs de mon bourreau.

Il ne fut pas plutôt satisfait, qu’il travailla à