Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 33.djvu/427

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queurs, le parti protestant seroit abattu pour jamais. « Cela seroit trop vray, leur répond L’Hôpital, s’ils y mouroient tous ; mais c’est plustost souhaiter que discourir : nous ne sommes plus au temps qu’on assignoit jour et champ de bataille pour combattre obstinément jusques à l’entière destruction de l’une des parties : ce siecle est aussi ingénieux et soigneux de pourvoir à la retraite, que les anciens estoient à vaillamment combattre. La perte de trois, quatre, cinq et six mille hommes les affoiblira, mais ce n’est pas les effacer ; la fureur ne sera que plus enflammée, la discipline plus exacte, toutes choses mieux considerées de l’autre costé, et moins observées de la part du vainqueur, estant l’insolence coustumière compagne de la victoire ; ils ont des villes pour eux retirer, rafraischir et rassembler à nous nuire à couvert : bref ce sera à recommencer. »

Le chancelier accorde, pour un moment, que les vœux des catholiques seront pleinement exaucés, qu’on exterminera les protestans, et que leurs biens seront confisqués. « Si est-ce, ajoute-t-il, que les enfans et successeurs, pour leur innocence, seront espargnés : ils croistront avec une extresme felonnie et rage, sachans et sentans la cruauté exercée envers leurs pères, et voyans leurs biens usurpez et ravis iniquement, comme ils penseront. Le désir de vengeance et du recouvrement de leurs biens les fera rallier et reprendre nouvelle intelligence ; de sorte qu’au lieu d’ensevelir le mal et la dissention civile, ce seroit la nourrir plustost et forger une hydre espouvantable. Cela ne seroit à craindre en une petite faction ; mais on n’a jamais vu une grande conjuration esteinte et