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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/179

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ANCIENS MÉMOIRES

luy, souffrant des fatigues au delà de son âge, et témoignant par tout un plaisir incroyable quand on luy faisoit faire tous ses exercices, par ce qu’il répondoient à cette inclination vehemente qu’il avoit pour les armes. Une conjoncture fit bientôt connoître ce naturel ardent et heureux qu’il avoit pour la guerre. On proposa dans Rennes, un certain dimanche, un prix pour celuy qui sçauroit le mieux s’exercer à la lute. Bertrand brûloit d’impatience de se mettre sur les rangs avec les autres, n’ayant point de passion plus violente que celle d’être aux prises avec quelqu’un. Sa tante, qui craignoit que ce jeune homme ne voulût être de la partie, s’avisa de le mener au sermon pour l’en détourner ; mais aussitôt que Bertrand, qui n’avoit alors que seize à dix-sept ans, vit le prédicateur en chaire, il se déroba secrettement de l’église et se rendit sur la place où se faisoit la lute. Il y fut bientôt reconnu par quelques-uns de ceux avec lesquels il avoit fait là dessus son apprentissage dans son enfance. Ils le prierent d’entrer en lice avec les autres, il en avoit plus de demangeaison qu’eux ; mais avant que de s’y engager, il leur fit promettre que jamais ils n’en parleroient à sa tante, dont il avoit interest de ménager la bienveillance, après avoir eu le malheur de perdre celle de ses parens pour de semblables choses. Après avoir reçu leur parole, il se mit en devoir de prêter le colet au premier qui se présenteroit devant luy. L’occasion ne lui manqua pas ; il apperçut un jeune Breton dont la contenance étoit tout à fait fiere, et qui s’applaudissoit sur le succès qu’il avoit eu dans la lute, ayant déjà terrassé douze de ses compagnons ; Bertrand voulut mesurer ses forces avec luy. La lute