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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/220

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SUR DU GUESCLIN.

Guesclin le meilleur cheval de son écurie et tout l’équipage convenable pour une si grande action, ce qu’il accepta volontiers.

Cette nouvelle, après s’être répanduë dans le camp des Anglois, passa bientôt jusques dans la ville de Dinan, dont tous les bourgeois et les officiers de la garnison furent fort désolez, apprehendans que Bertrand, dont ils avoient un extreme besoin pour soutenir le siège, ne se commit trop souvent, et ne perdît à la fin la vie, qu’il avoit déjà tant de fois risquée contre les Anglois, qui se promettoient qu’à force de le faire combattre, ils pouroient à la fin se délivrer d’un si dangereux ennemy. Mais une jeune demoiselle[1] leur remit l’esprit en les assurant que Bertrand sortiroit de cette affaire avec tout l’honneur et toute la gloire qu’il pouroit remporter avant le soleil couché. Cette fille, dont la naissance étoit illustre et l’éducation bien conditionnée, s’étoit aquise un très grand crédit dans toute la Bretagne, par les prédictions heureuses qu’elle avoit faites en d’autres rencontres, et le peuple, ignorant et grossier, imputoit à sortilege le talent qu’elle avoit dans la spéculation des astres, dans laquelle elle étoit fort expérimentée : quoyque dans le fonds toutes ces prédictions ne soyent pas toujours un coup sûr, puisque les astrologues se mécomptent souvent en nous donnant des mensonges pour des veritez.

Cependant on avoit tant de foy pour tout ce qu’elle

  1. Cette jeune demoiselle se nommoit Tiphaine de Raguenel, fille de Robert Raguenel, vicomte de la Bellière, et de Jeanne de Dinan. Elle etoit belle, pleine d’esprit, Bertrand Du Guesclin l’épousa par ma suite.