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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 4.djvu/342

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SUR DU GUESCLIN.

ny trêve. Bertrand s’informa quelle étoit la route la plus sûre et la plus commode qu’il falloit tenir. Henry, qui sçavoit le païs, luy répondit qu’il étoit necessaire d’aller jusqu’à Maguelon, que de là l’on pouroit percer tout au travers de l’Espagne avec beaucoup de facilité. Guesclin fit aussitôt marcher de ce côté-là. L’armée fit de si grands traites, qu’elle se trouva bientôt aux portes de cette ville. Il y eut ordre de camper devant. Henry voulut tenter si par des voyes amies il ne pouroit pas engager le gouverneur à luy remettre la place entre les mains, auparavant que d’en venir à la force ouverte. Il se rendit donc aux barrieres et fit appeller le capitaine qui commandoit dedans. Cet homme parut aussitôt pour sçavoir ce qu’il vouloit de luy. Ce prince luy dit qu’il s’appelloit Henry, comte de Tristemarre[1], auquel le royaume d’Espagne appartenoit de plein droit, et que comme tel il luy commandoit de luy ouvrir les portes de Maguelon[2]. Le gouverneur luy répondit fort fierement, qu’il ne le reconnoissoit point pour souverain, qu’il tenoit la place au nom du roy Pierre, et qu’il ne la rendroit qu’à luy ; qu’il eût donc à se retirer au plûtôt et qu’autrement il le feroit charger. Henry, tout indigné de l’insolence de ce capitaine et de la fierté de sa repartie, se separa de luy tout en colere, en le menaçant qu’il le feroit bientôt repentir de sa témérité : mais le gouverneur témoigna qu’il se soucioit peu non seulement de luy, mais de toutes les troupes qu’il avoit amenées.

  1. Tous les anciens Mémoires le nomment ainsi. Au lieu de Tristemarre, c’est Transtamare ou Translamare.
  2. Selon Du Chastelet (p. 99), cette ville s’appeloit Magalon.