gneur. Quelques-uns s’empressèrent de profiter des
offres du Roi, pour acquérir leur liberté : le plus
grand nombre aima mieux garder son argent ; il fallut
modérer la taxe d’affranchissement et ce moyen n’ayant
point encore réussi, on força ces misérables à faire
des sacrifices pour être libres malgré eux. Leur répugnance
cesse d’étonner si l’on considère que lorsqu’ils
étoient serfs, leurs seigneurs, qui avoient intérêt à
leur conservation, les aidoient à soutenir leurs familles,
leur donnoient asile quand la contrée étoit
envahie, les nourrissoient quand elle étoit dévastée ;
et qu’une fois affranchis, ils se trouvoient non-seulement
privés de tout secours dans leur détresse, mais
même de travail et de moyens d’existence. Devenus
libres, ils furent donc, du moins pendant les premiers
temps, et jusqu’à ce que les choses eussent pris un
autre cours, plus malheureux encore qu’auparavant ;
l’excès de leur misère les porta à la révolte, et telle
paroît avoir été la cause première de la Jacquerie dont
il sera parlé plus tard.
Cependant l’armée française étoit entrée en Flandre ; les rebelles effrayés n’osoient tenter le sort d’une bataille ; ils se retiroient en désordre, la province alloit être soumise ; la famine, et des pluies continuelles forcèrent Louis à accorder une paix qui fut bientôt rompue. Il se préparoit à recommencer la guerre, lorsqu’il mourut après avoir régné un peu moins de deux ans. Ce règne si court nous offre plusieurs monumens de son amour pour ses sujets. Il fit exécuter en France une constitution de l’empereur Frédéric, qui défendoit, sous aucun prétexte, de troubler les laboureurs dans leurs travaux, et de leur