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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 44.djvu/235

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DU CARDINAL DE RETZ. [1648]

des choses lui donnoit : il lui représenta au naturel le jeu que l’on avoit fait en toutes occasions de la parole royale ; les illusions honteuses et même puériles par lesquelles on avoit éludé mille et mille fois les résolutions les plus utiles et même les plus nécessaires à l’État. Il exagéra avec force le péril où le public se trouvoit par la prise tumultuaire et générale des armes. La Reine, qui ne craignoit rien parce qu’elle connoissoit peu, s’emporta, et elle lui répondit avec un ton de fureur plutôt que de colère : « Je sais bien qu’il y a du bruit dans la ville ; mais vous m’en répondrez, messieurs du parlement, vous, vos femmes et vos enfans. » En prononçant cette dernière syllabe, elle rentra dans sa petite chambre grise, et elle en ferma la porte avec force.

Le parlement s’en retournoit, et il étoit déjà sur les degrés, quand le président de Mesmes, qui est extrêmement timide, faisant réflexion sur le péril auquel la compagnie s’alloit exposer parmi le peuple, l’exhorta à remonter, et à faire encore un effort sur l’esprit de la Reine. M. le duc d’Orléans, qu’ils trouvèrent dans le grand cabinet, et qu’ils exhortèrent pathétiquement, les fit entrer au nombre de vingt dans la chambre grise. Le premier président fit voir à la Reine toute l’horreur de Paris armé et enragé, c’est-à-dire qu’il essaya de lui faire voir : car elle ne voulut rien écouter, et elle se jeta de colère dans la petite galerie.

Le cardinal s’avança, et proposa de rendre les prisonniers, pourvu que le parlement promît de ne plus tenir ses assemblées. Le premier président répondit qu’il falloit délibérer sur la proposition. On fut sur le