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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 44.djvu/303

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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

me trompai pas dans ma pensée, comme vous allez voir.

Je trouvai, en arrivant à l’hôtel de Longueville, Vincerot, capitaine de Navarre, et qui avoit été nourri page du marquis de Ragny[1], père de madame de Lesdiguières[2]. Elle me l’envoyoit de Saint-Germain où elle étoit, sous prétexte de répéter quelques prisonniers ; mais dans le vrai pour m’avertir que M. d’Elbœuf, une heure après avoir appris l’arrivée de M. le prince de Conti et de M. de Longueville à Paris, avoit écrit à La Rivière ces propres mots : « Dites à la Reine et à Monsieur que ce diable de coadjuteur perd tout ici ; que dans deux jours je n’y aurai aucun pouvoir : mais que s’ils veulent me faire un bon parti, je leur témoignerai que je ne suis pas venu à Paris avec une aussi mauvaise intention qu’ils se le persuadent. » La Rivière montra ce billet au cardinal, qui s’en moqua, et qui le fit voir au maréchal de Villeroy. Je me servis très-utilement de cet avis ; sachant que tout ce qui a façon du mystère est bien mieux reçu dans le peuple, j’en fis un secret à quatre ou cinq cents personnes. Les curés de Saint-Eustache, de Saint-Roch, de Saint-Merry et de Saint-Jean me mandèrent ; sur les neuf heures du soir, que la confiance que M. le prince de Conti avoit témoignée au peuple, d’aller tout seul et sans suite dans mon carrosse se mettre entre les mains de ceux mêmes qui crioient contre lui, avoit fait un effet merveilleux.

Les officiers des quartiers, sur les dix heures, me firent tenir plus de cinquante billets, pour m’avertir que leur

  1. Léonor de La Madelaine. (A. E.)
  2. Anne de La Madelaine, fille de Léonor de La Madelaine et d’Hippolyte de Gondy. (A. E.)