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Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 44.djvu/315

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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

les effets de cette irrésolution, quoique nous n’en connoissions pas la cause. Il n’a jamais été guerrier, quoiqu’il fût très soldat. Il n’a jamais été par lui-même bon courtisan, quoiqu’il ait eu toujours bonne intention de l’être. Il n’a jamais été bon homme de parti, quoique toute sa vie il y ait été engagé. Cet air de honte et de timidité que vous lui voyez dans la vie civile s’étoit tourné dans les affaires en air d’apologie. Il croyoit toujours en avoir besoin : ce qui, joint à ses maximes, qui ne marquent pas assez de foi à la vertu et à sa pratique, qui a toujours été à sortir des affaires avec autant d’impatience qu’il y étoit entré, méfait conclure qu’il eût beaucoup mieux fait de se connoître, et de se réduire à passer, comme il eût pu, pour le courtisan le plus poli, et pour le plus honnête homme, à l’égard de la vie commune, qui eût paru dans son siècle.

Madame de Longueville a naturellement bien du fonds d’esprit ; mais elle en a encore plus le fin et le tour. Sa capacité, qui n’a pas été aidée par sa paresse[1], n’est pas allée jusqu’aux affaires dans lesquelles la haine contre M. le prince l’a portée, et dans lesquelles la galanterie l’a maintenue. Elle avoit une langueur dans ses manières, qui touchoit plus que le brillant de celles mêmes qui étoient plus belles. Elle en avoit une même dans l’esprit qui avoit ses charmes, parce qu’elle avoit, si l’on peut le dire, des réveils lumineux et surprenans. Elle eût eu peu de défauts, si la galanterie ne lui en eût donné beaucoup. Comme sa passion l’obligea de ne mettre la politique qu’en second dans sa conduite, d’héroïne d’un

  1. C’est-à-dire à cause de sa paresse.