Aller au contenu

Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 44.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
68
notice

Quatre ans après, Retz ayant eu la permission de faire à Paris un assez long séjour, il y tomba malade, et madame de Sévigné lui prodigua les plus tendres soins. Elle écrivoit à madame de Grignan, le 9 mars 1672 : « Nous tâchons d’amuser notre bon cardinal. Corneille lui a lu une pièce qui sera jouée dans quelque temps, et qui fait souvenir des anciennes[1] ; Molière lui lira samedi Trissotin (les Femmes savantes), qui est une fort plaisante chose ; Despréaux lui donnera son Lutrin et sa Poétique : voilà tout ce qu’on peut faire pour son service. Il vous aime de tout son cœur, ce pauvre cardinal : il parle souvent de vous, et vos louanges ne finissent pas si aisément qu'elles commencent. »

Retz, qui avant d’être arrivé à une grande vieillesse éprouvoit plusieurs infirmités, suites naturelles de la vie qu’il avoit menée, et qui se trouvoit désormais insensible à presque toutes les jouissances, prit la sage résolution d’acquitter les dettes immenses qu’il avoit contractées dans le temps des troubles. Il falloit, pour y parvenir, réduire considérablement sa dépense ; et il résolut de se retirer pour long-temps à Saint-Mihel, qui faisoit partie de ses domaines. Cette résolution fut généralement applaudie ; et madame de Sévigné, dans diverses lettres à sa fille, témoigna tout le chagrin qu’elle lui causoit, quoiqu’elle ne pût s’empêcher de l’approuver.

« La tendresse qu’il a pour vous, et la vieille amitié qu’il a pour moi, m’attachent très-tendrement à lui. Je le vois tous les soirs depuis huit heures jusqu’à dix : il me semble qu’il est bien aise de m’avoir jus-

  1. Probablement Pulchérie, jouée au mois de novembre 1672.