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Page:Pierron - Histoire de la littérature grecque, 1875.djvu/556

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CHAPITRE XLVI.


Iamblique le romancier.


Un livre qui serait plus curieux pour nous que la Rhétorique d’Hermogène, c’est le roman intitulé Babyloniques ; mais ce roman ne nous est connu que par l’analyse de Photius. L’auteur se nommait Iamblique ; mais il ne faut pas le confondre avec Iamblique le philosophe, qui lui est bien postérieur. Il était né en Syrie, et il avait été élevé par un savant babylonien. Il se donnait lui-même comme un adepte des sciences occultes et comme un digne disciple des mages. Non-seulement il avait étudié la langue et la littérature chaldéennes, non-seulement il s’entendait à la magie, mais il avait fourni des preuves signalées de ses talents prophétiques : ainsi il avait prédit l’expédition de Vérus contre les Parthes, et le succès de cette expédition. C’est du moins ce qu’il voulait que l’on crût, ce qu’il avait écrit en toutes lettres dans son livre. Ce qui nous intéresserait dans ses récits, ce n’est pas peut-être le tableau du bonheur conjugal de Rhodanès et de Sinonis, ni celui de la passion de Garmos roi de Babylone, qui veut ravir Sinonis à son époux, ni celui des atroces vengeances du tyran, de la fuite des deux victimes, de la poursuite sans fin dont les accidents et les péripéties remplissaient l’ouvrage. On aurait là sans doute de précieuses révélations sur cette étrange société où Iamblique avait passé sa vie, et sur les contrées qu’avait parcourues ce mage à la fois grec et barbare, ce rhéteur nourri aux lettres babyloniennes, et qui avait assisté aux grandes révolutions de la haute Asie. Photius nous apprend d’ailleurs qu’Iamblique était un écrivain de talent. Quelques-uns des épisodes cités par le patriarche semblent même indiquer une certaine grâce d’imagination, je ne sais quoi de riant et d’aimable. Il n’y a pas trois siècles, les Babyloniques subsistaient encore en manuscrit dans la bibliothèque de l’Escurial et dans une bibliothèque de Florence ; mais ce livre a disparu on ne sait comment, et l’on renonce presque à le retrouver désormais, à moins de quelque heureux hasard.