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Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/322

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L’INSTALLATION DU RÉGIME

avaient rendue illusoire sous la domination française, devenait enfin une réalité. Anvers reprenait une activité qu’il n’avait plus connue depuis la fin du XVIe siècle. L’admirable situation de la ville lui restituait le rang d’où la politique impitoyable des Provinces-Unies l’avait fait déchoir en 1648. Dès avant 1826, les principales maisons d’Amsterdam y établissaient des succursales, et l’on pouvait prévoir qu’elle deviendrait un jour le premier port du royaume. Dans toutes les provinces la reprise du travail ramenait le bien-être. De nouvelles usines s’ouvraient ; la population urbaine augmentait grâce à l’afflux des ouvriers de la campagne. Le luxe du costume attestait visiblement le confort renaissant de la bourgeoisie. En 1820, plus de six cents fabricants participaient à une exposition des produits de l’industrie nationale ouverte dans la ville de Gand.

On savait que le roi s’intéressait de tout cœur à ce renouveau et que son initiative personnelle y avait largement contribué. Il s’imposait à lui-même et imposait à sa cour l’usage des produits indigènes. Sa cassette intervenait libéralement en faveur des industriels. Son cabinet était encombré de rapports qu’il étudiait avec une conscience inlassable et la compétence d’un économiste. Quoi qu’en aient pensé tantôt les Hollandais et tantôt les Belges, sa préoccupation s’avérait de favoriser également les deux parties du royaume, ou pour mieux dire de les unir, à leur égal avantage, en une activité commune[1].

La divergence de leurs intérêts et la situation financière de l’État lui imposaient des problèmes singulièrement épineux. Il fallait tout d’abord répartir proportionnellement la dette de la Hollande sur tout l’ensemble du royaume et y faire contribuer les provinces belges. Une augmentation considérable des impôts devait fatalement en résulter. Ils furent en réalité plus lourds qu’ils ne l’avaient été sous le régime français et ils dépassèrent, semble-t-il, ceux de tous les autres pays du continent[2]. Combattus âprement par la majorité des députés belges aux États-Généraux, ils ne justifièrent point cependant

  1. Voy. le rapport de Kaisersfeld sur les progrès réalisés en 1826. Gedenkstukken 1825-1830, t. I, p. 264 et suiv.
  2. Gedenkstukken 1825-1830, t. I, p. 267, 290.