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Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/133

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gène. (On peut aussi poser arbitrairement le poids atomique de l’oxygène comme égal à 16.) Dans tous les cas, une convention est nécessaire, faute de quoi les nombres donnés n’auraient aucun sens. C’est pourquoi les savants se sont efforcés de libérer le concept de poids atomique de cette dernière limitation et d’en faire un absolu dans un sens encore plus strict. La solution de ce problème, il est vrai, n’intéressait que peu les chimistes, car dans la chimie proprement dite, il n’est jamais question que de rapports pondéraux.

Dans toute science, il y a des conflits qui éclatent périodiquement entre les savants qui s’efforcent de mettre en ordre les axiomes existants, de les analyser et de les libérer de tout élément adventice ou accidentel (je les désignerai par la suite sous le nom de « puristes ») et ceux qui s’efforcent d’élargir les axiomes par l’introduction d’idées nouvelles. Cette dernière catégorie de chercheurs se plaît à lancer des antennes exploratrices dans les directions les plus diverses, pour tâcher de découvrir celles ou le progrès est possible. Or, en chimie, les puristes n’ont pas fait défaut plus qu’ailleurs et, naturellement, ils ont condamné expressément toute tentative pour faire du poids atomique autre chose qu’un rapport. Mais les esprits les plus éminents du monde chimique persistaient néanmoins à trouver au moins utile de considérer, à l’instar des mécanistes, les atomes comme des édifices matériels naturels de très petite taille et autonomes. Ces atomes devaient occuper dans la molécule des situations spatiales bien définies, les modifications chimiques consistant dans la séparation des atomes en vue de leur regroupement dans des formations nouvelles.

Ceci me rappelle un souvenir du temps où j’étais étudiant à Munich. J’ai encore présent à la mémoire l’impression profonde que fit sur nous autres, étudiants du laboratoire de chimie, la polémique engagée par le leader des puristes d’alors, Hermann Kolbe, à propos des premières formules de constitution qui s’élaboraient à cette époque. Kolbe foudroyait de ses anathèmes toutes les interprétations du détail des structures moléculaires basées sur des idées atomistico-mécanistes. Ses efforts n’eurent d’ailleurs que peu de succès ; mais, moins il était écouté, plus il