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Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, III et IV.djvu/324

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de quoi les satisfaire ; et qu’en cela consiste la vertu.

CALLICLÈS.

Oui, je le soutiens.

SOCRATE.

Cela posé, on a donc grand tort de dire que ceux qui n’ont besoin de rien sont heureux.

CALLICLÈS.

À ce compte, il n’y aurait rien de plus heureux que les pierres et les cadavres.

SOCRATE.

Mais aussi ce serait une terrible vie que celle dont tu parles. En vérité, je ne serais pas surpris que ce que dit Euripide fût vrai :


Qui sait si la vie n’est pas pour nous une mort,
Et la mort une vie ?[1]


Peut-être mourons-nous réellement nous autres, comme je l’ai ouï dire à un sage qui prétendait que notre vie actuelle est une mort, notre corps un tombeau, et que cette partie de l’âme, où résident les passions, est de nature à changer de sentiment, et à passer d’une extrémité à l’autre[2] ; et un homme habile dans l’art des

  1. L’un tire ces vers de Phryxus, l’autre de Polyide, drames d’Euripide. Walkenaer ne dit rien de ces fragmens.
  2. Quel est ce sage ? Sextus (liv. III, 24) cite une pareille pensée d’Héraclite. Clément d’Axandrie (Stramat. III, p. 434) la cite du même Héraclite et de Pythagore, et rapporte cet endroit du Gorgias. Routh cite un passage de Théodoret (Affect. curat. V, p. 544), où cette pensée est attribuée à Philolaüs.