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Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/296

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moment, mon ami, je me sentis embarrassé ; je perdis toute assurance, et la liberté d’esprit avec laquelle je comptais lui parler. Mais après, quand Critias lui dit que j’étais celui qui connaissait le remède, et quand lui, d’une manière que je ne puis dire, tourna sur moi [155d] ses yeux comme pour m’interroger, et tous ceux qui étaient dans la palestre formaient un cercle autour de nous, alors, ô mon ami, mon œil pénétra sous les plis de sa robe, et je me sentis brûler ! Et dans le trouble qui me saisit, je compris que Cydias se connaissait en amour, lorsque, faisant allusion à la beauté, il dit : « Garde-toi, daim timide, de paraître à la face du lion, [155e] de peur qu’il ne te déchire ». Pour moi, je me crus bien cette fois entre ses griffes. Pourtant à la question qu’il me fit si j’avais un remède contre le mal de tête, je pus encore, bien qu’avec peine, lui répondre que j’en connaissais un ; et comme il demanda ce que c’était : C’est proprement une plante, continuai-je ; mais chaque fois qu’on s’en sert, pour que le remède opère et guérisse, il y a une sentence qu’il faut avoir soin de prononcer, sans quoi la plante n’aurait aucune vertu.

[156a] Eh bien ! reprit-il, je vais écrire cette sentence.

Je la dirai si tu m’y engages, ou le ferai-je sans cela ?