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Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/482

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mieux m’expliquer clairement. Quand le désir déraisonnable, maîtrisant en nous le goût du bien, [238c] se porte vers le plaisir que promet la beauté, et qu’en même temps la foule des désirs de la même famille le pousse vers la seule beauté corporelle, il acquiert une force irrésistible, et prenant son nom de sa force même s’appelle amour[1]. — Eh bien ! mon cher Phèdre, ne te semble-t-il pas comme à moi que je suis inspiré par quelque divinité ?

PHÈDRE.

En effet, tes paroles coulent aujourd’hui avec une abondance inusitée.

SOCRATE.

Écoute-moi donc en silence ; car ce lieu a quelque [238d] chose de divin, et si les nymphes qui l’habitent me causaient dans la suite de mon discours quelque transport frénétique, il ne faudrait pas t’en étonner. Déjà me voici monté au ton du dithyrambe.

PHÈDRE.

Rien de plus vrai.

SOCRATE.

C’est toi pourtant qui en es cause. Mais écoute

  1. Ἔρως, de ἐρρωμένος, fort ou puissant. Ce passage étymologique est intraduisible en français, comme plusieurs autres qui suivent.