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Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/782

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LE BANQUET.

sirènes[1], si je ne veux pas rester jusqu’à la fin de mes jours assis à la même place auprès de lui. Pour lui seul [216b] dans le monde, j’ai éprouvé ce dont on ne me croirait guère capable, de la honte en présence d’un autre homme : or il est en effet le seul devant qui je rougisse. J’ai la conscience de ne pouvoir rien opposer à ses conseils, et pourtant de n’avoir pas la force, quand je l’ai quitté, de résister à l’entraînement de la popularité ; je le fuis donc ; mais quand je le revois, j’ai honte d’avoir si mal tenu ma promesse, [216c] et souvent j’aimerais mieux, je crois, qu’il ne fut pas au monde, et cependant si cela arrivait, je suis bien convaincu que j’en serais plus malheureux encore ; de sorte que je ne sais comment faire avec cet homme-là.

Tels sont les prestiges qu’exerce, et sur moi et sur bien d’autres, la flûte de ce satyre. Sachez maintenant combien ma comparaison est juste et de quelles merveilleuses qualités il est doué. Je puis vous assurer que personne [216d] ici ne sait ce qu’est Socrate ; mais, puisque j’ai commencé, je veux vous le faire connaître. Vous voyez combien Socrate montre d’ardeur pour les beaux jeunes gens, comme il est constamment auprès

  1. Odyssée, liv. XII, v. 47.