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Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome VI.djvu/132

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INTRODUCTION

reportent les allusions d’Isocrate dans son Busiris, sauf que celui-ci, en décrivant la société égyptienne, laisse de côté le paradoxe de la communauté des femmes et des enfants (Pohlenz, 222). Qu’y a-t-il de vrai dans ces assertions ?

Au début du Timée, Socrate, parlant à Timée, Hermocrate et Critias, résume l’entretien qu’il eut la veille avec eux et un quatrième personnage, « sur la meilleure constitution et les qualités requises des citoyens qui la composent ». L’essentiel en était : les guerriers séparés des laboureurs et artisans ; chaque métier rigoureusement spécialisé et les guerriers uniquement chargés de garder la cité contre les ennemis du dehors et du dedans et de juger avec douceur les citoyens, d’où l’alliance exigée de deux qualités opposées, ardeur irascible et philosophie ; leur éducation dans la gymnastique, la musique « et toutes les autres connaissances nécessaires » ; la défense qu’on leur fait de rien posséder, ceux qu’ils protègent leur devant une solde alimentaire, sur laquelle ils vivent en commun ; les femmes élevées comme les hommes, préparées à la guerre comme eux et partageant tous leurs exercices ; les femmes et les enfants communs, les précautions nécessaires étant prises contre l’inceste ; l’excellence de la race sauvegardée par l’assortiment secret des mariages et par l’organisation d’un dépôt d’inaptes, où l’on relègue les enfants mal nés, pour les y reprendre au besoin s’ils s’améliorent et les y remplacer par ceux de bonne naissance qui ne donnent pas satisfaction (17 c-19 a). Ce résumé fait, Socrate demande s’il est complet, et Timée le rassure : rien n’y manque. Ainsi le Timée est la suite d’une conversation sur la meilleure constitution. Il s’ouvre par le résumé de cette conversation. Ce résumé contient en fait l’essentiel de l’organisation décrite dans les Livres II-V de la République. Si donc il fait allusion à celle-ci, il n’est pas complet, quoi que Socrate en dise. Donc, observe Pohlenz (214), ou bien Platon limite volontairement son choix, ou il imagine de toutes pièces un dialogue antérieur dont le contenu répondrait au résumé, ou il fait allusion à un dialogue que nous ne possédons plus et dont le contenu était vraiment tel. Or, aux yeux de Pohlenz et de beaucoup d’autres critiques, cette dernière hypothèse est la seule admissible.

Mais pourquoi ne pas dire simplement que Platon, dans l’entretien fictif qui constitue notre Timée, imagine un autre