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Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome VI.djvu/136

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INTRODUCTION

J’ai tenu à reproduire tout ce raisonnement, qui, certes, est impressionnant. J’ai tenu aussi à reproduire toute la substance de l’exposé sur lequel s’appuie ce raisonnement, et j’ai même poussé l’analyse un peu plus loin, on verra pourquoi. Mais ne devons-nous pas commencer par observer que la critique est loin de s’être accordée sur la date du Busiris[1] ? De Benseler (393) à Meyer (373) et H. Gomperz (372), il y a loin, et les dates intermédiaires sont autant des conjectures que les dates extrêmes. Pohlenz (p. 219) et tous les auteurs qui le suivent, nous disent : « En 373, Isocrate aurait eu 64 ans : comment eût-il pu alors s’excuser de sa jeunesse ? ». Or, sommes-nous si certains qu’Isocrate ait en fait allégué cette excuse, puisque dans ces lignes finales où la vulgate nous la fait lire, la première main de notre meilleur manuscrit, l’Urbinas, ignore précisément les deux incises qui font mention de l’âge[2] ? Une date tardive n’est donc pas absolument impossible, encore moins une date moyenne, car Pohlenz, qui maintient contre Drerup ces deux incises, prend comme terme extrême 385, que Drerup proposait comme date approchée. Ainsi la marge à demander ne serait pas grande pour permettre un recours aux duo libri d’Aulu-Gelle, si, parmi les parallélismes qu’on nous montre dans le Busiris, les plus délicats, par exemple les arguments qui justifient la spécialisation du travail, restaient inexplicables sans un emprunt d’Isocrate à Platon, car ils ne nous forcent pas à dépasser les limites possibles de cette « première livraison ». Mais l’hypothèse de l’emprunt, inutile pour tous les autres, ne s’impose même pas pour ceux-là, et la date du Busiris, obligatoirement fixée en deçà de certaines limites pour les partisans d’une pré-République, est pour nous matière beaucoup plus libre et, disons le mot, plus indifférente.

  1. Pour la bibliographie du Busiris et le débat sur les dates, cf. G. Mathieu, loc. cit. et Münscher, art. Isokrates, RE, IX, 2, spécialement col.  2177/80. Münscher accepte les arguments de Pohlenz sur les relations du Busiris avec la pré-République de Platon.
  2. Dans Bus. 50 « καὶ μὴ θαυμάσῃς, εἰ (νεώτερος ὤν καὶ) μηδέν σοι προσήκων… ἡγοῦμαι γὰρ οὐ (τῶν πρεσβυτάτων οὐδὲ) τῶν οἰκειοτάτων κ. τ. λ. », Urbinas (Γ) ignore les mots que j’ai mis entre crochets. Cf. E. Drerup, hoc. op. omn. I, Leipzig, 1906, p. cxxxi sq., apparat p. 98 (et p. 91 pour les renvois concernant la valeur de la seconde main).