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Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome VI.djvu/242

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LA RÉPUBLIQUE

la justice est sagesse, c’est de la justice qu’il usera ; mais s’il en est comme je le disais, c’est de l’injustice.

Je suis charmé, Thrasymaque, dis-je, que tu ne te contentes pas de dire oui et non d’un signe de tête, et que tu me répondes si bien.

C’est pour te faire plaisir, dit-il.


L’injustice
empêche
les hommes
d’agir de concert.

XXIII  À merveille ; mais fais-moi encore la grâce de répondre à ceci : crois-tu qu’un État, une armée, une troupe de brigands, de voleurs, ou toute autre bande de malfaiteurs associés pour quelque mauvais coup pourraient tant soit peu réussir, s’ils violaient à l’égard les uns des autres les règles de la justice ?

dNon certes, dit-il.

Et s’ils les observaient, ne réussiraient-ils pas mieux ?

Assurément.

La raison en est sans doute, Thrasymaque, que l’injustice fait naître entre les hommes des dissensions, des haines, des batailles, au lieu que la justice entretient la concorde et l’amitié. Est-ce vrai ?

Soit, dit-il : je ne veux pas contester avec toi.

Tu es bien aimable, excellent homme. Mais réponds à ma question. Si c’est le propre de l’injustice de faire naître la haine partout où elle se trouve, quand elle se produira chez des hommes libres ou des esclaves, ne fera-t-elle pas naître aussi parmi eux la haine, la discorde et l’impuissance de rien eentreprendre en commun ?

Assurément.

Et si elle se trouve en deux personnes, ne seront-elles pas divisées, haineuses, hostiles à l’égard l’une de l’autre, comme elles le sont à l’égard des justes ?

Elles le seront, dit-il.

Et si l’injustice, ô homme divin, se rencontre chez une seule personne, perdra-t-elle sa propriété, ou la gardera-t-elle entière ?

Qu’elle la garde entière, dit-il.