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Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome VII, 2.djvu/100

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LA RÉPUBLIQUE IX

de nous une espèce de désirs terribles, sauvages, sans frein, qu’on trouve même dans le petit nombre de gens qui paraissent être tout à fait réglés, et c’est ce que les songes mettent en évidence. Vois si ce que je dis est vrai, et si tu te ranges à mon avis.

Je m’y range.


II  Maintenant rappelle-toi ce que nous avons dit de l’homme démocratique[1] ; cqu’il avait été formé dès l’enfance par un père économe, qui n’estimait que les désirs intéressés et n’avait que dédain pour les désirs superflus, qui ont pour objet l’amusement et le luxe. N’est-ce pas cela ?

Si.

Mais que, faisant sa compagnie de gens plus raffinés et livrés à ces désirs dont je viens de parler, il s’était jeté dans toute sorte d’excès et dans le genre de vie de ses amis, par aversion pour la parcimonie de son père ; que cependant doué d’un naturel meilleur que ses corrupteurs, comme il se voyait tiraillé den deux sens opposés, il avait pris un milieu entre les deux manières de vivre, et, usant de l’une et de l’autre dans une mesure qui lui semblait juste, il menait une vie qui n’était ni sordide ni déréglée ; qu’ainsi d’oligarchique il était devenu démocratique.

C’était bien en effet, et c’est encore l’idée que nous avons de cette sorte d’homme.

Suppose maintenant, continuai-je, que cet homme ayant vieilli ait à son tour un jeune fils qu’il élève dans ses propres habitudes.

Je le suppose.

Suppose encore qu’il lui arrive les mêmes choses qu’à son père[2], qu’il soit entraîné eà une vie entièrement désordonnée, décorée par ceux qui l’entraînent du nom d’indépendance absolue ; que son père et ses proches parents prêtent main

    spontanée des problèmes étudiés pendant le jour, et à l’état de l’âme occupée par des pensées raisonnables et pures.

  1. Au livre VIII, 561 a-562 a.
  2. Son père, hésitant entre les maximes d’un père parcimonieux et celles des frelons qu’il fréquentait, a fini par ouvrir la citadelle de son âme aux passions superflues. Platon a exposé ce combat 559 d-561 a.