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Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome XIII, 1.djvu/138

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LETTRE III

connais ; j’estimais, en outre, qu’il fallait lui envoyer chaque année les revenus habituels et même profiter de ma présence pour les augmenter, non pour les diminuer. N’obtenant rien, je songeais à partir. Alors, tu me persuadas de rester encore l’année ; tu réaliserais, disais-tu, la fortune entière de Dion, pour en envoyer la moitié à Corinthe et laisser le reste à son fils. J’aurais encore beaucoup à b dire sur tant de promesses faites par toi et que tu n’as point tenues, mais comme il y en a trop, j’abrège. Tu as vendu tous les biens de Dion sans son consentement, après avoir affirmé que tu ne le ferais point s’il n’y consentait et tu as, homme admirable, mis impudemment le comble à tous tes beaux engagements : tu as imaginé un moyen qui n’était ni élégant, ni ingénieux, ni juste, ni profitable : tu voulus m’effrayer, comme si j’ignorais alors tes agissements, pour m’empêcher de réclamer l’envoi de l’argent. c Quand, en effet, tu exilas Héraclide[1], ni les Syracusains ni moi ne trouvâmes juste cette mesure. Je vins donc avec Théodote[2] et Eurybios[3] te supplier de n’en rien faire. Tu saisis alors ce prétexte pour me dire que depuis longtemps, tu le voyais bien, je n’avais de toi nul souci et ne m’occupais que de Dion et de ses parents et amis. Et parce que maintenant Théodote et Héraclide, amis de Dion, se trouvaient sous le coup d’une accusation, je mettais tout en œuvre pour les soustraire au châtiment. Voilà d quels furent nos rapports mutuels en ce qui concerne la politique. Si tu as remarqué par ailleurs en moi une attitude inamicale à ton égard, sache bien que ce fut là l’origine de tous nos différends. Et n’en sois pas surpris. À bon droit, en effet, je paraîtrais vil aux yeux de tout homme sensé, si séduit par la grandeur de ton pouvoir, j’avais trahi un hôte ancien et un ami malheu-

  1. Héraclide appartenait à la noblesse syracusaine. Il joue un très grand rôle dans tous les événements politiques de cette époque. Après s’être rallié au parti de Dion et avoir contribué à la chute de la tyrannie, il suscita, par ambition, toutes sortes de difficultés au vainqueur de Denys. — Voir la notice particulière de la Lettre VII.
  2. Théodote, oncle d’Héraclide, semble avoir toujours favorisé les desseins et les ambitions de son neveu. Son nom est généralement associé à celui d’Héraclide soit dans les Lettres, soit chez Plutarque. — Cf. Lettre IV, 320 e ; VII, 348 c, 349 d et suiv. — Plutarque, Dion, c. 12, 45, 47.
  3. Eurybios ne nous est pas connu. Son nom ne se trouve qu’ici