Aller au contenu

Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome XIII, 1.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
lxxii
NOTICES

cisions, des multiples erreurs inévitables dans les œuvres de faussaires.

Tous les arguments extrinsèques invoqués contre l’authenticité n’ont pas même valeur. Il n’est pas exact, comme on l’a souvent répété sur la foi d’anciens éditeurs, que la tradition manuscrite lui soit défavorable. On a sans doute confondu cette lettre avec la 12e. En tout cas, aucun de nos meilleurs manuscrits n’exprime le moindre doute, et, après avoir personnellement examiné tous ceux de la Bibliothèque nationale de Paris, de la Vaticane et de la Laurentienne, à Florence, j’en ai découvert un seul à la Vaticane, l’Urbinas 29, du xviie siècle, qui ajoute à la suscription de la lettre le νοθεύεται.

Le fait que cette lettre adressée à Denys est séparée des trois premières qui ont même destinataire, qu’elle tient le dernier rang dans la collection et vient après la 12e, certainement apocryphe, serait un indice plus sérieux ; généralement, en effet, les recueils de ce genre se terminent par les pièces suspectes ou fausses. L’indication n’est pourtant pas décisive, car notre tradition manuscrite ne remonte pas au delà du ixe siècle et nous ignorons si la disposition actuelle n’est pas l’œuvre de scribes qui classaient les copies une fois transcrites suivant leur propre sentiment. Toujours est-il qu’ils n’ont pas dû trouver dans leurs modèles mention de l’inauthenticité, sans quoi ils l’auraient signalée, comme ils l’ont fait pour la 12e lettre. Ajoutons enfin que l’ordre de la plupart de nos manuscrits connus n’est peut-être pas absolument invariable ; nous avons indiqué déjà l’exception du Parisinus 3009. Cette exception ne se rattacherait-elle pas à la source du manuscrit ?

Mais si les arguments extrinsèques ne suffisent pas à éclairer notre jugement, l’examen direct de l’épître éveille la défiance. Pour qui ajoute foi aux récits de la 7e lettre et aux renseignements de Plutarque, il sera difficile de ne pas relever dans l’écrit présent une multitude d’invraisemblances psychologiques et historiques. N’insistons pas sur la déception que l’on éprouve en comparant cette lettre avec les Dialogues. Le caractère de Platon nous y apparaît sous des jours très différents et l’on a peine à reconnaître dans l’épître le philosophe désintéressé du Théétète, du Banquet ou de la République : on pourrait nous objecter sans invraisemblance que le caractère d’un homme est souvent moins idéaliste que ses