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Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome XIII, 2.djvu/273

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NOTICE

Socrate du Clitophon n’est que la caricature du personnage falot et prétentieux que voulaient accréditer des disciples inintelligents.

Dans sa dissertation de 1881, Kunert avait établi le premier une relation entre notre dialogue et la socratique antisthénienne. Mais pour lui, l’écrit est tout aussi bien dirigé contre Platon que contre Antisthène, et il refusait, pour ce motif, d’en admettre l’authenticité.

Si l’ouvrage est de Platon, comment expliquer que le fervent disciple de Socrate ait risqué, même une seule fois, de dérouter ses lecteurs, en laissant croire qu’il prenait à son compte la rude leçon infligée à son maître ? Ne devait-il pas du moins compléter son œuvre par une contre-partie, opposer au faux Socrate le vrai Socrate, qui aurait aisément triomphé de son impétueux adversaire ? Pour résoudre la difficulté, plusieurs critiques, parmi lesquels Grote et Th. Gomperz, adoptent l’hypothèse acceptée déjà par Boeckh[1] : le dialogue serait incomplet. Mais ils ajoutent : ce fragment fut sans doute publié peu après la mort de Platon. L’auteur avait formulé si âprement ses objections qu’il s’était trouvé embarrassé pour les réfuter. Aussi, substitua-t-il à cet extrait le Ier livre de la République où le problème amorcé dans le fragment serait traité plus à fond. Brünnecke pense, au contraire, que l’ouvrage est complet. Le Socrate antisthénien ne pouvait se défendre contre des attaques trop justifiées, et le ton même du morceau, pastiche évident de la littérature sophistique contemporaine, ne trompait, sans doute, aucun lecteur. La personne du vrai Socrate sortait indemne du débat. Le dialogue dut être écrit après la République. Si, en effet, Clitophon paraît convaincu de l’incapacité dialectique de Thrasymaque, c’est que déjà cette incapacité a été démontrée. Or, elle s’est manifestée aux yeux de tous dans les contro-

  1. Comment. in Minoëm, p. 11 : « Nec minus falsum est, ut hoc obiter addam, quod spurium Clitophontem plerique omnes mutilatum putant : quem ex auctoribus manibus truncum excidisse inde intelligitur, quod ne uetusti quidem Platonici philosophi, quibus antiquissima exemplaria ad manum erant, habuerunt integriorem. Procl. in Tim. 1, p. 7. Πτολεμαῖος δὲ ὁ Πλατωνικὸς Κλειτοφῶντα αὐτὸν οἴεται εἶναι. τοῦτον γὰρ ἐν τῷ ὁμωνύμῳ διαλόγῳ μηδ' ἀποκρίσεως ἠξιῶσθαι παρὰ Σωκράτους ».