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Page:Plotin - Ennéades, t. II.djvu/421

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LIVRE QUATRIÈME.


prières qui lui sont adressées, mais d’une autre manière que nous ne le faisons nous-mêmes. Elle peut encore exercer d’autres sens dans ses relations, soit avec elle-même, soit avec les choses étrangères, par exemple, avoir la sensation des odeurs et celle des saveurs perçues par les autres êtres. Peut-être a-t-elle besoin de percevoir les odeurs des liquides pour remplir ses fonctions providentielles à l’égard des animaux et pour prendre soin de son propre corps.

Il ne faut cependant pas réclamer pour elle des organes semblables aux nôtres. Les organes, en effet, ne sont pas semblables dans tous les animaux. Ainsi, tous n’ont pas des oreilles pareilles, et ceux qui n’ont pas d’oreilles perçoivent cependant les sons. Comment la Terre verra-t-elle, si la lumière lui est nécessaire pour voir ? car il ne faut pas réclamer pour elle des yeux. Ayant précédemment accordé qu’elle possède la puissance végétative[1], nous devons accorder comme conséquence que cette puissance est primitivement par son essence une espèce d’esprit (πνεῦμα)[2] : or, pourquoi refuserions-nous d’admettre que cet esprit soit diaphane ? Nous devons admettre qu’il est diaphane [en puissance], parce qu’il est esprit ; et qu’il est diaphane en acte, parce qu’il est illuminé par la sphère céleste. Il n’est donc ni impossible ni incroyable que l’âme de la Terre possède la vue. Il faut en outre se rappeler qu’elle n’est point l’âme d’un corps vil, qu’elle doit être par conséquent une déesse. En tout cas, cette âme doit être éternellement bonne.

  1. Voy. ci-dessus, § 22, p. 882.
  2. Voici comment Ficin commente ce passage : « Inter omnes mundi partes, quasi unius animalis membra, dicitur esse communio quædam vel contiguitas vel continuitas vel unio, cujus quidem quinque fundamenta videntur. Primum est una omnium ubique materia. Secundum, concorda qualitatum : nam sicut elementa, quamvis discorda, quibusdam tamen proximis inter se qualitatibus concordia sunt, sic et rerum omnium gradus, sive componantur ex elementis, sive non componantur, quamvis inter se differentes, tamen concor-