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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/108

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LIVRE TROISIÈME.


l’âme devient capable de démontrer qu’étant l’image de l’intelligence elle peut la voir par elle-même, c’est-à-dire par celle de ses puissances qui ressemble le plus exactement à l’intelligence [à savoir par la pensée pure], qui lui ressemble autant qu’une partie de l’âme peut approcher d’elle.

IX. Il faut donc contempler l’âme et sa partie la plus divine afin de savoir ce qu’est l’Intelligence. Pour y arriver, voici ce que tu dois faire : sépare de l’homme, c’est-à-dire de toi-même, d’abord le corps, puis la puissance de l’âme qui le façonne (πλάττουσα ψυχὴ (plattousa psuchê)), ensuite la sensation, la concupiscence, la colère, toutes les passions basses qui t’inclinent vers la terre. Ce qui reste alors de l’âme, c’est ce que nous nommons l’image de l’Intelligence, image qui rayonne d’elle, comme du globe immense du soleil rayonne la sphère de lumière qui l’entoure[1]. On ne saurait accorder

  1. On peut rapprocher de ce passage de Plotin le morceau suivant d’Ibn-Gébirol : « Si tu veux te figurer ces substances simples et la manière dont ton essence s’y répand et les environne, il faut que tu élèves ta pensée vers le dernier intelligible, que tu la purges et que tu la purifies de la souillure des choses sensibles, que tu la délivres des liens de la nature, et que tu arrives par la force de ton intelligence à la limite extrême de ce qu’il te sera possible d’atteindre de la réalité de la substance intelligible, jusqu’à ce que tu te dépouilles, pour ainsi dire, de la substance sensible, et que tu deviennes comme si tu ne la connaissais plus. Alors ton être environnera tout le monde corporel, et tu le placeras dans l’un des recoins de ton âme : car en faisant cela tu comprendras combien le sensible est petit à côté de la grandeur de l’intelligible. Alors les substances spirituelles seront placées devant toi et se tiendront devant tes yeux ; tu les verras autour de toi et au-dessus de toi, et il te semblera qu’elles sont ta propre essence. Tantôt tu croiras que tu es une portion d’elles, parce que tu seras lié à la substance corporelle ; tantôt tu croiras que tu es entièrement identique avec elles et qu’il n’y a point de différence entre toi et elles, parce que ton essence sera unie à la leur et que ta forme sera attachée à la leur. Et si tu montes aux différents degrés des substances intelligibles, tu trouveras les corps