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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/148

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LIVRE CINQUIÈME.


être telle ; il faut cependant qu’il y ait une telle chose. Qui pourrait embrasser à la fois dans sa totalité la puissance de ce principe ? Si un être embrassait à la fois dans sa totalité la puissance de ce principe, en quoi en différerait-il ? Se borne-t-il à en embrasser une partie ? — Tu saisiras bien ce principe par un acte intuitif et simple, mais tu ne te le représenteras point dans sa totalité ; autrement, tu seras l’intelligence pensante, si toutefois tu as atteint ce principe ; mais il te fuira, ou plutôt tu le fuiras toi-même. Quand tu considères Dieu, considère-le donc dans sa totalité. Quand tu le penses, sache que ce que tu te rappelles de lui est le Bien : car il est la cause de la vie sage et intellectuelle, parce qu’il est la puissance dont procèdent la vie et l’intelligence ; il est la cause de l’essence et de l’être, parce qu’il est un ; il est simple et premier, parce qu’il est principe. C’est de lui que tout procède[1]. C’est de lui que le premier mouvement procède, sans être en lui ; c’est de lui que procède aussi le premier repos, parce que lui, il n’en a pas besoin ; il n’est lui-même ni en mouvement ni en repos : car il n’a rien en quoi il puisse se reposer ou se mouvoir. Par rapport à quoi, vers quoi ou en quoi pourrait-il se mouvoir ou se reposer ? Il n’est pas non plus limité : car par quoi serait-il limité ? Il n’est pas non plus infini de la manière dont on se représente une masse énorme : car où aurait-il besoin de s’étendre ? Serait-ce pour avoir quelque chose ? Mais il n’a besoin de rien. C’est sa puissance qui est infinie. Il ne

  1. Tout le morceau qui précède est cité par le P. Thomassin qui le commente en ces termes : « Totum conspici posse Deum censet Plotinus, ut totum, sed ut totum omnia, imo ut totum nihil omnium, quod videatur ab oculo puro raptim, et statim aufugiat, aut a quo nos potius statim delabamur ; restet autem post iila coruscamina memoria nescio quæ ejus quod visum est, non aliud exhibens nobis quam bonum et unum, omnium principium, et nihil omnium quorum est principium. » (Dogmata theologica, t. I, p. 198.)