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LIVRE PREMIER.


actions au pâtir, ou reconnaîtront-ils des actions absolues, comme marcher et parler[1] ? Nommeront-ils mouvements toutes les actions qu’ils rapportent au pâtir, et actes les actions absolues, ou bien placeront-ils des actions des deux espèces au nombre des mouvements et au nombre des actes ? Ils donneront sans doute le nom de mouvement à marcher, qui est une chose absolue, et celui d’acte à penser, auquel ne correspond rien de passif[2] ; sinon, ils seront obligés de soutenir qu’il n’y a rien d’actif dans marcher et dans penser[3]. Mais si marcher et penser n’appartiennent pas à la catégorie d’agir, il faut expliquer à quoi ils appartiennent. Dira-t-on que penser (νοεῖν (noein)) se rapporte à l’intelligible (νοὴτον (noêton)), de même que l’intellection (νόησις (noêsis)), parce que la sensation se rapporte à l’objet sensible ? Si l’on rapporte la sensation à l’objet sensible, pourquoi ne rapporte-t-on pas également sentir à l’objet sensible ? La sensation, se rapportant à une autre chose, a une relation avec cette chose ; mais, outre cette relation, elle a la propriété d’être un acte ou une passion. Si donc la passion, outre qu’elle appartient à une autre chose ou qu’elle dépend d’une autre chose, a la propriété d’être par elle-même quelque chose, comme l’acte, alors la marche, outre

  1. Ces objections sont citées et discutées par Simplicius, ibid., fol. 79, e.
  2. Au lieu de diviser les verbes en transitifs et intransitifs, Plotin propose ici de les diviser en verbes qui expriment une action parfaite ou un état, comme penser, reposer, et verbes qui expriment une action successive, comme diviser, marcher. Il subdivise ensuite chacune de ces deux classes en deux espèces : verbes exprimant une action absolue, par laquelle le sujet seul est modifié, comme marcher, penser ; verbes exprimant une action relative, qui se rapporte à un objet extérieur ou tend à le modifier, comme diviser, etc. ; ces derniers servent seuls à former les verbes passifs, dont notre auteur ne veut pas qu’on fasse un genre à part. Voy. ci-après § 19, p. 186, note 1.
  3. Cette objection est citée et discutée par Simplicius, ibid., fol. 80, g, et fol. 81, b.