Aller au contenu

Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/273

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
212
SIXIÈME ENNÉADE.


on pouvait compter trouver au contraire l’âme simple et s’arrêter à cette conclusion, comme au terme de ses recherches. Après avoir ainsi considéré cette âme que nous avons prise comme un échantillon du monde intelligible, de même que le corps représente le monde sensible, examinons comment cette unité peut être multiple ; comment le multiple peut à son tour être unité, non un composé formé de parties séparables, mais une seule nature à la fois une et multiple. Car, nous l’avons déjà dit, c’est en partant de ce point et en le démontrant que nous établirons solidement la vérité au sujet des genres de l’être.

V. La première considération qui se présente à notre esprit, c’est que chaque corps soit d’animal soit de plante est multiple par les couleurs, les formes, les grandeurs, les espèces des parties, la diversité de leur position, et que toutes ces choses cependant proviennent de l’unité, soit de l’Un absolument simple, soit de l’habitude de l’unité universelle, soit d’un principe qui ait plus d’unité, par conséquent plus d’être que les choses qu’il produit, parce que, plus on s’éloigne de l’unité, plus on s’éloigne aussi de l’être. Le principe qui forme les corps doit donc être un sans être absolument un ni identique à l’Un ; sinon, il ne produirait pas une pluralité qui fut aussi éloignée de l’unité : reste qu’il soit unité-pluralité (πλήθος ἕν (plêthos hen)). Or ce principe, c’est l’âme : elle est donc unité-pluralité. Et en quoi consiste cette pluralité ? Dans les raisons [séminales] des choses qui procèdent de l’âme. Les raisons ne sont pas autres que l’âme : car l’âme est elle-même raison, principe des raisons ; les raisons sont l’acte de l’âme qui agit selon son essence, et cette essence est la puissance des raisons[1]. L’âme est donc pluralité en même temps qu’unité : l’action qu’elle exerce sur les autres choses le démontre clairement. Mais qu’est l’âme si on la considère en dehors de toute

  1. Voy. sur ce point Enn. III, liv. II, § 16 ; t. II, p. 60.