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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/314

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LIVRE TROISIÈME.

chose[1] ? Il parait en être ainsi : car la blancheur et la noirceur se disent d’une autre chose, d’un sujet blanc ou noir. Il en est de même du double (je ne parle pas ici du double par opposition à la moitié, mais du double qui s’affirme d’un sujet, quand on dit : Ce bois est double) . La paternité est encore, ainsi que la science, un attribut d’un autre sujet, duquel elle se dit. Le lieu est ce qui limite, et le temps, ce qui mesure une autre chose. Mais le feu, le bois considéré comme bois, ne sont pas des attributs. Il en est de même de Socrate, de la substance composée [de forme et de matière], de la forme qui est dans Ta substance, parce que ce n’est pas une modification d’un autre sujet. En effet, la forme n’est pas un attribut de la matière ; elle est un élément du composé : l’homme et la forme de l’homme sont une seule et même chose[2]. La matière est aussi un élément du composé ; sous ce rapport, elle se dit d’un sujet, mais ce sujet n’est pas autre qu’elle. La blancheur, au contraire, considérée en elle-même, n’existe que dans le sujet dont elle se dit. Ainsi, la chose qui n’existe que dans le sujet dont elle se dit n’est pas substance[3] ; la substance est au contraire la chose qui est par elle-même ce qu’elle est. Si elle fait partie d’un sujet, alors elle complète le composé, dont les éléments existent chacun en eux-mêmes et n’en sont affirmés que sous un rapport autre que celui d’exister en lui. Considérée

  1. Cette définition de la substance appartient à Aristote, ainsi que la division de la substance en matière, forme et composé. Voy. ci-dessus p. 152, note 1.
  2. « La forme substantielle, c’est ce qu’est proprement un être. Chaque être ne diffère point, ce semble, de sa propre essence ; et la forme est l’essence même de chaque être. » (Aristote, Métaphysique, liv. VIII, ch. 5, 6 ; trad. de MM. Pierron et Zévort, t. II, p. 11, 16.)
  3. « Quand une chose est l’attribut d’une autre, elle n’est pas une essence. Ainsi l’homme blanc n’est pas une essence ; les substances seules ont une essence. » (Aristote, ibid., ch. 5 ; trad. fr., p. 11.)