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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/42

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SIXIÈME ENNÉADE, LIVRE III.


choses, c’est d’être le sujet ou substratum des accidents, de ne s’affirmer de rien. La substance est par elle-même ce qu’elle est. Elle est le principe d’où sortent et par lequel existent les autres choses, celui auquel se rapportent les modifications passives, et dont sortent les actions. Elle est ce qui n’est pas dans un sujet, à moins que par là on n’entende faire partie d’un sujet, ou concourir avec lui à constituer une unité. Il y a en cela analogie entre les deux principes homonymes, la substance corporelle et la substance intelligible.

(VI) L’existence ne s’affirme pas dans le même sens de la substance et de l’accident. Quand on dit : L’être est, l’être est affirmé être simplement, être de lui-même. Quand on dit : L’être est blanc, l’existence est un accident pour la blancheur comme la blancheur est un accident pour l’être ; l’être n’est pas dans la blancheur, c’est la blancheur au contraire qui est en lui. Ainsi la substance possède l’existence primitivement ; l’accident, postérieurement, par participation. La substance sensible existe ainsi d’elle-même par rapport à ses accidents, mais non par rapport à la substance intelligible : car elle en tient l’existence.

(VII) Il y a dans la matière un degré d’être moindre que dans la forme, parce que la forme est une raison (ou essence), tandis que la matière n’a qu’une ombre de raison.

(VIII) En traitant de la substance sensible, il vaut mieux étudier les substances composées (où la matière et la forme sont réunies). Leur caractère est encore n’être pas dans des sujets et d’être elles-mêmes sujets pour le reste. Mais, bien différente de la substance intelligible, la substance sensible suppose la présence de certains accidents propres : car elle consiste dans la réunion des qualités et de la matière. En outre, le fondement de la substance sensible (la matière) est stérile, et, n’ayant que l’apparence de l’être, ne peut donner l’existence au reste comme le fait l’être véritable.

(IX-X) La substance sensible, étant corporelle, peut se diviser en espèces d’après la distinction des corps bruts et des corps organisés, des corps chauds et des corps secs, etc., ou bien encore d’après les formes des plantes et des animaux, etc. — Quant à la distinction qu’a faite Aristote des substances premières et des substances secondes, tel feu et le feu universel diffèrent entre eux en ce que l’un est individuel et l’autre universel, mais il n’y a pas entre eux de différence substantielle.

Quantité. — (XI-XII) La Quantité comprend le nombre sensible et l’étendue corporelle. Le lieu, considéré comme contenant les corps, et le temps, comme mesure du mouvement, rentrent dans le genre de la Relation.

Le grand et le petit (τὸ μέγα ϰαὶ τὸ μίκρον (to mega kai to mikron)) se rapportent au genre de la Quantité, parce que ce sont des choses simples, absolues ; mais plus petit, plus grand, plus beau, se ramènent au genre de la Relation. Quant au beau, il appartient à la Qualité.

Dans la Quantité, grand et petit, beaucoup et peu, sont opposés comme contraires. En effet, la multitude est une extension du nombre ; la rareté en est une contraction. Il y a une raison qui détermine la grandeur et la petitesse, et dont la participation rend un objet grand ou petit. Quant au haut et au bas, ce sont des relatifs.