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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/421

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SIXIÈME ENNÉADE.

Si, par sa nature, le temps est avec l’Être identique dans le même rapport [que cette ligne est avec son centre], et si l’Être identique est infini par sa puissance aussi bien que par son éternité, il faut qu’en vertu de sa puissance infinie il produise une nature qui soit en quelque sorte parallèle à cette puissance infinie, qui s’élève avec elle et dépende d’elle, qui essaie enfin d’égaler par le cours mobile du temps cette puissance qui demeure immuable en elle-même[1]. Mais alors même cette puissance de l’Être intelligible reste supérieure à l’univers parce que c’est elle qui en détermine l’extension.

Comment donc la nature inférieure participe-t-elle à l’intelligible, dans la mesure du moins où elle peut y participer ? — Elle y participe parce que l’intelligible est présent tout entier partout, quoique, par suite de l’impuissance des choses qui le reçoivent, il ne soit pas aperçu tout entier dans chacune d’elles. L’Être identique est présent partout, non comme le triangle matériel (qui est multiple sous le rapport du nombre dans plusieurs sujets quoiqu’il y soit identique sous le rapport de l’essence), mais comme le triangle immatériel duquel dépendent les triangles matériels. — Pourquoi donc le triangle matériel n’est-il pas partout, comme le triangle immatériel ? — C’est que la matière ne participe pas tout entière au triangle immatériel, qu’elle reçoit aussi d’autres formes, qu’elle ne s’applique pas tout entière à tout intelligible. En effet, la nature première ne se donne pas tout entière à toute chose ; mais elle se communique d’abord aux genres premiers [de l’Être], puis par ceux-ci elle se communique aux autres êtres ; du reste, elle n’en est pas moins dès le principe présente à l’univers entier.

XII. Mais comment est-elle présente à l’univers entier ? — Elle lui est présente parce qu’elle est la Vie une. En effet, dans le monde considéré comme un être vivant, la Vie ne

  1. Voy. le passage de Platon cité dans le tome II, p. 172, note 1.