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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/463

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SIXIÈME ENNÉADE.

figures en les concevant[1]. Ce qui le prouve, c’est que la figure du monde est antérieure à nous, et que les figures naturelles, propres aux productions de la Nature, sont nécessairement antérieures aux corps et existent dans le monde intelligible à l’état de figures premières, sans limites déterminées : car ce sont des formes qui n’existent point dans d’autres sujets ; elles subsistent par elles-mêmes et n’ont pas besoin d’étendue, parce que l’étendue est l’attribut d’un sujet.

Il y a donc partout une seule figure dans l’Être[2], et chacune des figures [que cette figure unique contenait implicitement] est devenue distincte soit dans l’Animal, soit avant l’Animal. Quand je dis que chaque figure est devenue distincte, je n’entends pas qu’elle soit devenue une étendue, mais qu’elle a été assignée à un animal particulier : ainsi, dans le monde intelligible, à chaque corps a été assignée sa figure propre, au feu par exemple, la pyramide[3]. Notre monde cherche à imiter cette figure, quoiqu’il ne puisse y réussir à cause de la matière. Nous avons également ici-bas

  1. Ficin commente en ces termes la doctrine de Plotin : « Sunt in divinis certe figurarum ideæ, per quas et mundi sphæris et unicuique speciei determinatæ figura sunt. Illic autem dimensio vel figura non aliter quam destinatione quadam intelligentiæ terminatur. Linea illic hac tantum ratione dicitur infinita, quoniam idealis lineæ ratio nullum habet terminum quantitatis ; alioquin non que cum lineis quibuslibet majoribus minoribusve congrueret. Essentia prima in primis consideratur viva, deinde intellectualis agnoscitur ; sed, quum primum intellectualis est, simul etiam Virens intellectuale vel intellectuale Animal definitur : Numeri et Figuræ, prius illic involuta, mox cum intellectuali illic Animali pariter evolvuntur. »
  2. C’est la figure sphérique. Voy. les vers de Parménide que nous citons ci-après, p. 405, note 1.
  3. « Disons donc, d’après la droite raison et la vraisemblance, que l’espèce de solide qui a la forme pyramidale est l’élément et le germe du feu. » (Platon, Timée, p. 56 ; trad. de M. H. Martin, p. 151.)