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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/494

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LIVRE SEPTIÈME.

Platon dit que dans chacune de ces choses il y a une âme[1], c’est-à-dire une puissance capable de produire le feu sensible. Ainsi le principe qui produit le feu dans notre monde est une vie ignée (ζωὴ πυρίνη (zoê purinê), un feu plus réel que le nôtre. Puisque le Feu intelligible est un feu plus réel que le nôtre, il possède aussi une vie plus réelle. Le Feu en soi possède donc la vie. Il y a une raison pareille dans les autres éléments, l’air et l’eau. Pourquoi ces choses ne seraient-elles pas animées comme la terre ? Elles sont évidemment contenues dans l’Animal universel et elles en constituent des parties. Sans doute la vie n’est pas manifeste en elles, pas plus que dans la terre ; mais on peut la reconnaître en elles, comme on la reconnaît dans la terre, par ses productions : car il naît des animaux dans le feu, et dans l’eau avec plus d’évidence encore ; il s’en forme aussi dans l’air[2]. Les flammes qu’on voit chaque jour s’allumer et s’éteindre ne manifestent pas l’Âme universelle [à cause de leur peu de durée] ; sa présence ne se montre pas dans le feu, parce qu’il ne trouve pas ici-bas une masse permanente. Il en est de même de l’eau et de l’air : si par leur nature ces éléments étaient plus consistants, ils laisseraient voir en eux l’Âme universelle ; mais comme leur substance est divisée, ils ne nous découvrent pas la puissance qui les anime. Il en est d’eux comme des fluides qui se trouvent dans notre corps, du sang par exemple : la chair, qui paraît animée, se forme aux dépens du sang[3] ; celui-ci doit donc

  1. On ne trouve pas cette assertion dans les écrits mêmes de Platon ; mais elle semble résulter des idées que lui prête Diogène Laërce liv. III, § 74. Creuzer fait à ce sujet une remarque fort juste : « Potuerunt Platonici recentiores multa Platonis decreta, quæ ille dialogis suis non incluserat, sed in scholis prodiderat et accuratius exposuerat, per manus quasi tradita servataque habere. Plotini quidem non est istiusmodi ingenium quod cuiquam ex veteribus philosophis quidquam affingat. »
  2. Voy. notre tome II, p. 279, note 5.
  3. « C’est le sang qui nourrit les chairs et le corps