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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/504

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LIVRE SEPTIÈME.

essences qui sont vues et avec l’Intelligence qui les voit ; mais il n’est ni les essences ni l’Intelligence ; il est seulement leur cause ; il produit la pensée en répandant sa lumière sur les essences et sur l’intelligence. C’est ainsi que l’Intelligence est arrivée à la plénitude, et qu’arrivée à la plénitude elle est devenue parfaite et elle a vu. Son principe, c’est ce qui a précédé sa plénitude. Mais elle a un autre principe [le Bien], lequel lui est extérieur en quelque sorte, c’est celui qui lui a donné sa plénitude, et qui, en la lui donnant, lui a imprimé sa forme.

XVII. Comment les essences peuvent-elles se trouver dans l’Intelligence et la constituer, si elles n’étaient ni dans ce qui a donné, ni dans ce qui a reçu cette plénitude, puisque, avant de recevoir du Bien sa plénitude, l’Intelligence ne possédait pas les essences ? — Il n’est point nécessaire qu’un principe possède lui-même ce qu’il donne : il suffit, dans les choses intelligibles, de regarder celui qui donne comme supérieur, celui qui reçoit comme inférieur : c’est en cela que consiste la génération dans l’ordre des êtres véritables[1]. Ce qui occupe le premier rang doit être en acte ; les choses postérieures doivent être en puissance ce qui les précède. Ce qui occupe le premier rang est supérieur à ce qui occupe le second rang ; ce qui donne est également supérieur à ce qui est donné, parce qu’il est meilleur. S’il y a donc un principe antérieur à l’acte, il doit être supérieur à l’acte et à la vie ; quoiqu’il ait donné la vie à l’Intelligence, il est plus beau, plus vénérable encore que la vie. Ainsi l’Intelligence a reçu la vie, sans que le principe dont elle l’a reçue ait du renfermer lui-même quelque variété. La vie est l’empreinte de Celui qui l’a donnée, mais elle n’est pas sa vie. Au moment où l’Intelligence a tourné ses regards vers lui, elle était indéterminée ; dès qu’elle a attaché son regard sur lui, elle a été déterminée par lui, quoiqu’il n’eût pas lui-même de détermination. Aussitôt

  1. Voy. Enn. V, liv. I, § 6, p. 13.