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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/526

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LIVRE SEPTIÈME.

quent celui qui prétend mépriser l’existence et la vie reçoit un démenti de lui-même et de toutes affections qu’il éprouve. Si quelqu’un se dégoûte de la vie, c’est qu’il ne considère que celle à laquelle la mort est mêlée et non la vie véritable.

XXX. Maintenant, nous élevant au bien par la pensée, nous devons examiner s’il faut que le plaisir soit mêlé au bien, pour que la vie ne demeure pas imparfaite, contemplât-on d’ailleurs les choses divines et même Celui qui est leur principe.

Quand Platon paraît croire que le bien est composé de l’intelligence, qui en est la substance, et de l’affection que la sagesse fait éprouver à l’âme[1], il n’affirme pas que ce composé [de l’intelligence et du plaisir] soit la fin [de l’âme] ni le Bien en soi ; il veut seulement dire que l’intelligence est le bien et que nous nous réjouissons de la posséder. Voilà une première manière de concevoir l’opinion [de Platon] sur le bien. Une autre manière de l’interpréter, c’est de mélanger le plaisir à l’intelligence en faisant de ces deux choses une seule substance, de telle sorte qu’en acquérant ou en contemplant une pareille intelligence nous possédions le bien : car [disent les partisans de cette opinion] une de ces deux choses ne saurait exister dans l’isolement, ni, supposé qu’elle existât, être désirable à titre de bien. Comment donc [leur demanderons-nous] l’intelligence peut-elle être mêlée au plaisir de manière à ne plus former avec lui qu’une seule nature ? Personne ne saurait croire que le plaisir du corps puisse être mélangé à l’intelligence ; ce plaisir est incompatible même avec les joies de l’âme.

Ce qui est vrai, c’est qu’à toute action, à toute disposition,

    est dans la sphère intelligible, par rapport à l’Intelligence et à ses objets, le soleil l’est dans la sphère visible, par rapport à la vue et à ses objets… Quelque belles que soient la science et la vérité, tu ne te tromperas pas en pensant que l’idée du Bien en est distincte et les surpasse en beauté. » (Platon, ibid. ; trad. fr., p. 55.)

  1. Voy. ci-dessus § 25, p. 457.