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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/534

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LIVRE SEPTIÈME.

vient à elle, ou plutôt, qu’il manifeste sa présence, parce que l’âme s’est détachée des autres choses présentes, qu’elle s’est embellie le plus possible, qu’elle est devenue semblable à lui par les moyens connus de ceux-là seuls qui sont initiés, elle le voit tout à coup apparaître en elle : plus d’intervalle, plus de dualité, tous deux ne font qu’un ; impossible de distinguer l’âme d’avec Dieu, tant qu’elle jouit de sa présence ; c’est l’intimité de cette union qu’imitent ici-bas ceux qui aiment et qui sont aimés en cherchant à se fondre en un seul être. Dans cet état, l’âme ne sent plus son corps : elle ne sent plus si elle vit, si elle est homme, si elle est essence, être universel, ou quoi que ce soit au monde : car ce serait déchoir que de considérer ces choses, et l’âme n’a pas alors le temps ni la volonté de s’en occuper ; quand, après avoir cherché Dieu, elle se trouve en sa présence, elle s’élance vers lui et elle le contemple au lieu de se contempler elle-même[1]. Quel est son état en ce moment ? Elle n’a pas le

    termes : « Informitate seu abdicatione formarum [mens fruitur summo Bono], qua fit ut ipsi Uni summo summeque informi, formas nempe largienti et nullam in se habenti, assimiletur et adaptetur mens, et permisceatur, et informis ab informi quodammodo informetur. Ut igitur Deus, quia super omnes formas est, ideo informis est ; ita anima informis evadat necesse est ut super omnia sit, eique tum, qui super omnia est, informi per suam informitatem ita coaptetur, ut unum cum ipso eradat. Non ergo exteriores tantum formæ beatæ animæ exuendæ sunt, sed et suæ et innatæ, et ipsa sibi abscindenda et excutienda est, ut jam nec moveatur, nec vivat, nec anima sit, nec intellectus, nihilque horumsit, quia et Deus nihil horum est ; suum itaque esse formatum abdicabit, ut esse divino et superessentiali informitate posthac induatur et potiatur. » (Dogmata theologica, t. I, p. 336).

  1. « Quelle ne serait pas la destinée d’un mortel à qui il serait donné de contempler le beau sans mélange, dans sa pureté et sa simplicité, non plus revêtu de chairs et de couleurs humaines, et de tous ces vains agréments condamnés à périr, à qui il serait donné de voir face à face, sous sa forme unique, la beauté divine ! » (Platon, Banquet, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 317.)