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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/598

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LIVRE NEUVIÈME.

nous, après nous être élevés jusqu’à l’âme, dire qu’elle ne donne pas seulement l’unité, mais qu’elle est elle-même l’Un en soi ? — Non. Comme les autres choses que l’âme donne aux corps, telles que la forme, la figure, ne sont nullement identiques à l’âme qui les donne ; de même, elle donne l’unité sans être l’Un : ce n’est qu’en contemplant l’Un qu’elle rend une chacune de ses productions, comme ce n’est qu’en contemplant l’homme en soi qu’elle fait l’homme (à condition cependant qu’elle prenne avec l’idée de l’homme en soi l’unité qui s’y trouve impliquée). Toutes les choses que l’on appelle unes ont chacune une unité proportionnée à leur essence, en sorte qu’elles participent plus ou moins de l’unité selon qu’elles participent plus ou moins de l’être. Ainsi, l’âme est autre chose que l’Un ; cependant, comme elle est à un plus haut degré [que le corps], elle participe davantage de l’unité, sans être l’Un même : car elle est une, mais l’unité en elle est contingente. L’âme et l’Un sont deux choses différentes, comme le corps et l’Un. Une quantité discrète comme un chœur est très-loin de l’Un ; une quantité continue en approche davantage ; l’âme en approche et en participe encore plus. Si, de ce que l’âme ne saurait exister sans être une, on conclut que l’âme et l’Un sont identiques, nous ferons à cela deux réponses. D’abord, les autres choses ont aussi une existence individuelle parce qu’elles possèdent l’unité, et cependant elles ne sont pas l’Un même (car le corps n’est pas identique à l’Un, et il participe cependant de l’Un). Ensuite, l’âme est multiple aussi bien qu’elle est une, quoiqu’elle ne se compose point de parties : car elle possède plusieurs facultés, la raison discursive, le désir, la perception, etc., facultés que l’unité, comme un lien, joint toutes ensemble. L’âme donne sans doute l’unité à une autre chose [au corps], parce qu’elle possède elle-même l’unité ; mais cette unité, elle la reçoit d’un autre principe [savoir de l’Un même].

II. Mais [dira-t-on], dans chacun des êtres particuliers qui