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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/77

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CINQUIÈME ENNÉADE.


engendrée par l’Un peut-elle donc être l’Intelligence ? C’est que, par sa conversion vers l’Un, elle le voit ; or cette vision (ὄρασις (orasis))[1] constitue l’Intelligence. Toute faculté qui perçoit un autre être est sensation ou intelligence : la sensation est semblable à la ligne droite, et l’intelligence, au cercle[2]. Toutefois, le cercle est divisible, et l’Intelligence est indivisible : elle est une, mais, en même temps qu’elle est une, elle est la puissance de toutes choses. Or la pensée considère toutes ces choses [dont l’Intelligence est la puissance] en se séparant en quelque sorte de cette puissance ; sinon, l’Intelligence n’existerait pas. En effet, l’Intelligence a conscience de ce que peut sa puissance, et cette conscience constitue son essence. Par conséquent, l’Intelligence détermine son essence par elle-même, au moyen de la puissance qu’elle tient de l’Un, et, en même temps, elle voit que son essence est une partie des choses qui appartiennent à l’Un et qui en procèdent ; elle voit qu’elle doit toute sa force à l’Un, que c’est par lui qu’elle a le pri-

    qu’il lui est naturellement attaché, qu’il n’y a pas d’intermédiaire entre eux, qu’ils sont séparés seulement sous ce rapport qu’ils sont distincts, non par leur nature, mais par la différence qui existe entre Celui qui engendre et Celui qui est engendré en tant que l’un engendre et que l’autre est engendré. » (Contre Julien, VIII, p. 273-374.) Voy. aussi les passages de saint Augustin que nous avons cités dans le tome I, p. 323, et dans le tome II, p. 555-559.

  1. Sur l’intuition intellectuelle, Voy. Enn. III, liv. VIII, § 10 ; t. II, p. 234.
  2. C’est une idée empruntée à Platon, Lois, X, p. 893. Plotin est cité sur ce point avec Platon lui-même par Damascius : « L’identité, la perpétuité et les autres caractères analogues sont les attributs de l’immuable. C’est pourquoi, comme le dit Plotin [Enn. II, liv. II, § 3 ; t. II, p. 164], le mouvement circulaire imite sous ce rapport l’intelligence, ou plutôt, comme le dit Platon dans le livre X des Lois, cette image du mouvement de l’intelligence a été créée pour être l’apparence immuable de la véritable immutabilité. » (Des Principes, éd. Kopp, p. 322.) Voy. aussi Olympiodore, Commentaire sur le 1er Alcibiade, p. 103, éd. Creuzer.