Aller au contenu

Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/83

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
22
CINQUIÈME ENNÉADE.


Aussi, ceux des anciens qui ont le plus fidèlement suivi la doctrine de Pythagore, de ses disciples et de Phérécyde, se sont-ils surtout occupés de l’intelligible. Les uns ont consigné leurs opinions dans leurs ouvrages ; d’autres les ont exposées seulement dans des entretiens que l’écriture n’a pas conservés. Il en est d’autres enfin qui ne nous ont rien laissé sur ce sujet.

X. Ainsi, il faut admettre qu’au-dessus de l’Être est l’Un : nous l’avons démontré autant que la raison le désirait, autant qu’il est possible de démontrer quand on traite de pareilles questions. Au second rang sont l’Être et l’Intelligence ; au troisième, l’Âme. Mais, s’il y a dans la nature trois principes, comme nous venons de le dire, l’Un, l’Intelligence, l’Âme, il doit y avoir aussi en nous trois principes. Je ne veux pas dire que ces trois principes soient dans les choses sensibles : car ils en sont séparés ; ils sont hors du monde sensible, comme les trois principes divins sont hors de la sphère céleste, et ils constituent l’homme intérieur, selon l’expression de Platon[1]. Notre âme est donc quelque chose de divin : elle a une nature autre [que la nature sensible] et conforme à celle de l’Âme universelle. Or, l’âme parfaite possède l’intelligence ; mais il y a l’intelligence qui raisonne [la raison discursive], et l’intelligence qui fournit tous les principes du raisonnement [l’intelligence pure]. La raison discursive de l’âme n’a besoin pour s’exercer d’aucun organe corporel[2] ; dans ses opérations, elle conserve toute sa pureté, en sorte qu’elle est capable de raisonner purement. Séparée du corps, elle doit sans hésitation être mise au premier rang des choses intelligibles. Il n’est pas besoin de la placer dans un lieu ; il faut la concevoir hors de tout lieu : car, si elle existe par elle-même, hors du corps, d’une manière immatérielle,

  1. Expression employée par Platon dans l’Alcibiade, p. 36.
  2. Voy. Enn. I, liv. I, § 9 ; t. I, p. 46.