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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/85

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CINQUIÈME ENNÉADE.


sible, qui subsiste, non dans un lieu, mais en lui-même, qui est contemplé par une multitude d’êtres, par chacun des êtres aptes à le recevoir, mais qui reste distinct de ces êtres, de même que le centre subsiste en lui-même, tandis que les rayons viennent tous aboutir à lui de tous les points de la circonférence[1]. C’est ainsi que nous-mêmes, par une des parties de nous-mêmes, nous touchons à Dieu, nous nous y unissons, nous y sommes en quelque sorte suspendus (έφαπτόμεθα, σύνεσμεν, ἀνηρτήμεθα (ephaptometha, sunesmen, anêrtêmetha)) ; or, nous sommes édifiés en lui (ἐνιδρύμεθα (enidrumetha)) quand nous nous tournons vers lui[2].

XII. Comment peut-il se faire que nous possédions des principes si relevés à notre insu et sans nous en occuper le plus souvent ? Car il y a même des hommes qui ne s’en occupent jamais. — Néanmoins ces principes, c’est-à-dire, l’Intelligence et le principe supérieur à l’Intelligence, lequel demeure toujours en lui-même [c’est-à-dire l’Un], ces principes, dis-je, agissent sans cesse. Il en est de même de l’âme : elle se meut toujours ; mais les opérations qui se produisent en elle ne sont pas toujours perçues : elles ne viennent jusqu’à nous que lorsqu’elles arrivent à se faire sentir. Quand la faculté qui agit en nous ne transmet pas son action à la puissance qui sent, cette action ne se communique pas à l’âme entière[3] ; nous n’en avons pas connaissance, parce que, bien que nous possédions la sensibilité, ce n’est pas seulement cette puissance, c’est l’âme tout entière qui constitue l’homme[4]. Chaque puissance de l’âme, tant que la vie dure, exerce par elle-même sa fonction propre ; mais nous ne le savons que lorsqu’il y a communication et per-

  1. Voy. le développement de cette comparaison dans l’Enn. III, liv. VIII, § 7 ; t. II, p. 225.
  2. Voy. les passages de saint Augustin et de Bossuet cités dans les Éclaircissements du tome I, p. 330, notes 1 et 2
  3. Sur la conscience, Voy. les Éclaircissements du tome I, p. 352-355.
  4. « Neque nos corpora sumus ; nec ego tibi