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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/205

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le Barbare, et l’engagea à persuader Eurybiade, qui avait dans Aristide une confiance plus entière qu’en Thémistocle, et à lui faire entendre qu’il n’y avait de salut pour eux qu’en combattant sur mer. Aussi, dans le conseil que tinrent les généraux, Cléocritus de Corinthe ayant dit à Thémistocle qu’Aristide n’approuvait pas son sentiment, puisque, présent à la délibération, il gardait le silence : « Je ne me serais point tu, répondit Aristide, si Thémistocle n’avait proposé le parti le plus expédient ; si je ne bouge présentement, ce n’est point par affection pour sa personne, c’est la marque de mon assentiment à sa proposition. » Voilà ce qui se passait dans le conseil des capitaines de la flotte grecque.

Aristide s’aperçut que Psyttalie, petite île située dans le détroit, en face de Salamine, était pleine de troupes ennemies : il embarque sur des esquifs les plus ardents et les plus aguerris des fantassins ; il descend à Psyttalie, charge brusquement les Barbares, et les taille en pièces ; il n’épargna que les principaux, qu’il fit prisonniers. De ce nombre étaient trois fils de la sœur du roi, nommée Sandaucé, qu’Aristide envoya sur-le-champ à Thémistocle, et qui furent immolés, dit-on, à Bacchus Omestès, sur l’ordre du devin Euphrantidas, pour l’accomplissement d’un oracle[1]. Aristide entoura l’île de tous côtés d’une troupe d’hommes bien armés, avec ordre de recevoir ceux qui y seraient poussés par la violence des vagues, afin de sauver les alliés, et de ne pas laisser échapper un seul ennemi. Car ce fut apparemment sur ce point que se firent les chocs les plus violents des vaisseaux, et les plus grands efforts des combattants. Aussi dressa-t-on un trophée dans Psyttalie.

Après la bataille, Thémistocle voulut sonder Aristide : « Nous venons, dit-il, d’accomplir une grande œuvre ;

  1. Voyez la Vie de Thémistocle dans le premier volume.