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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/431

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donc de le faire bannir. Pour cela il s’attacha Glaucia et Saturninus, deux hommes très-violents et très-emportés, qui disposaient d’une tourbe d’indigents toujours prêts au désordre : il se servit d’eux pour proposer de nouvelles lois, fit venir à Rome des gens de guerre, qu’il mêla dans les assemblées, et fomenta une sédition contre Métellus. Suivant le récit de Rutilius[1], d’ailleurs homme de bien et ami de la vérité, mais ennemi particulier de Marius, celui-ci n’obtint son sixième consulat qu’en répandant de grandes sommes d’argent dans les tribus, qu’en achetant l’exclusion de Métellus, et l’élection de Valérius Flaccus, qu’il prit pour second et non pour collègue dans le consulat. Jamais avant lui le peuple n’avait conféré autant de fois la dignité consulaire à personne, si ce n’est à Valérius Corvinus, encore Valérius vit-il s’écouler quarante-cinq années entre son premier consulat et son dernier, tandis que Marius, poussé par un élan soutenu de la fortune, parcourut, après son premier consulat, cinq consulats successifs.

C’est pendant le dernier qu’il amassa le plus de haine contre lui, en se rendant complice des nombreux méfaits de Saturninus, entre autres du meurtre de Nonius : Nonius disputait le tribunat à Saturninus, Saturninus l’assassina. Devenu tribun, Saturninus proposa la loi agraire : il y était expressément porté que le Sénat viendrait jurer d’observer les décrets du peuple, et de ne point mettre obstacle à leur exécution. Cet article de la loi, Marius affecta de l’attaquer dans le Sénat, et il déclara qu’il ne prêterait pas le serment, et qu’il pensait qu’aucun homme sage ne le prêterait, parce que, si la loi était mauvaise, c’était insulter le Sénat que de lui faire prêter ce serment

  1. Publius Rulilius Rufus, cité plusieurs fois avec éloge par Cicéron. Il avait été consul l’année d’avant le second consulat de Marius. Il ne reste rien de ses écrits.