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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/115

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NICIAS.

ture, par lesquelles on pouvait acquérir de la popularité, et il y déployait une magnificence et un bon goût comme jamais n’en avaient fait briller ses devanciers et ses contemporains. Parmi les offrandes qu’il consacra aux dieux, on voit encore dans l’Acropole une statue de Pallas qui a perdu sa dorure, et, dans le temple de Bacchus, la chapelle portative placée au-dessous des trépieds qu’il dédia comme vainqueur dans les jeux[1] ; car il y fut souvent couronné, jamais vaincu. Or, on raconte qu’un jour, dans une représentation dont Nicias faisait les frais, parut sur la scène un esclave, qui jouait le rôle de Bacchus : c’était un grand et beau jeune homme, et qui n’avait pas encore de barbe. Les Athéniens, charmés à sa vue, applaudirent longtemps ; et Nicias s’étant levé dit qu’il regarderait comme une impiété de retenir dans l’esclavage un homme que ces applaudissements venaient de consacrer au dieu ; et il donna au jeune homme la liberté.

On rappelle encore la magnificence qu’il déploya à Délos, en homme qui sentait profondément le respect dû à la divinité. Les villes y envoyaient des chœurs, pour chanter les louanges d’Apollon[2]. Mais, lorsqu’ils abordaient, la population accourait aussitôt vers leur vaisseau, et exigeait qu’ils chantassent, comme ils se trouvaient, sans ordre, dans le trouble et l’agitation d’un débarquement, pendant qu’ils mettaient leurs couronnes et revêtaient leurs robes. Nicias conduisit une de ces théories ; mais il débarqua dans l’île de Rhénia[3]

  1. Platon, dans le Gorgias, fait mention de ces trépieds dédiés par Nicias.
  2. Les Athéniens faisaient cette cérémonie chaque année ; ils nommaient théorie la pompe sacrée qu’ils envoyaient à Délos, et théores ceux qui étaient chargés de la conduire.
  3. C’était un îlot séparé de Délos par un canal de cinq cents pas de largeur.