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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/315

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et il voyait que l’État avait besoin de pareils hommes. C’étaient, en effet, les propos que tenait partout Agésilas au sujet de cette affaire, par complaisance pour son fils. Cléonyme reconnut alors le zèle qu’Archidamus avait mis à le servir ; et les amis de Sphodrias, ayant repris confiance, lui revinrent en aide.

Agésilas avait pour ses enfants une affection extrême. On raconte que, quand ses enfants étaient petits, il partageait leurs jeux, et allait, comme eux, à cheval sur un roseau. Un de ses amis l’ayant trouvé un jour dans cette posture, il le pria de n’en parler à personne avant d’être lui-même devenu père.

Sphodrias fut absous, et les Athéniens n’en eurent pas plutôt été informés qu’ils résolurent la guerre. On blâma vivement Agésilas d’avoir empêché, par complaisance pour un désir inopportun et puéril de son fils, un jugement juste, et rendu sa patrie coupable d’une aussi grande iniquité aux yeux des Grecs.

Comme il voyait que Cléombrotus ne montrait point d’ardeur à faire la guerre aux Thébains, il renonça au bénéfice de la loi, dont il avait profité auparavant au sujet de cette expédition même, et dès lors il se jeta en Béotie. Il fit beaucoup de mal aux Thébains, mais non sans en éprouver lui-même. Antalcidas, le voyant blessé, lui dit : « Le beau prix de tes leçons que te paient les Thébains, pour leur avoir appris à combattre quand ils ne pouvaient et ne savaient pas le faire ! » On dit, en effet, que les Thébains furent en ce temps-là plus guerriers qu’ils ne l’avaient jamais été, comme si les fréquentes expéditions des Lacédémoniens contre eux les eussent exercés et formés. C’est dans cette vue que Lycurgue l’ancien, dans ce qu’on appelle ses Trois Rhètres[1], détendit de

  1. C’était le nom des lois fondamentales de Lacédémone. Voyez la Vie de Lycurgue dans le premier volume.